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Place des pensées - Sur Maurice Blanchot
de Richard Millet - 88 pages
Je ne suis pas un blanchotien, membre d'une garde rapprochée, gardien d'un temple invisible, de ceux qui baissent voix et paupières en prononçant le nom du maître, comme si le silence était le signe suprême de l'élection héréditaire ou de l'appartenance solitaire et irréductible à une communauté sans nom, invisible, inavouable, voire impossible, mais qui trouverait sa loi dans cette impossibilité qui a pour nom l'amitié. La fascination que Blanchot a exercée sur moi (une fascination qui perdure, à présent tout autre et cependant la même, jusque dans l'apparent oubli ou ce délaissement qui, comme les ombres du crépuscule; l'été, modifie en détail notre perception du monde), avait trait à la solitude, à l'angoisse, au doute, au dégoût de soi, à la mort comme expérience dépourvue d'enseignement, et à ce que la littérature pouvait, pensais-je alors, devant la mort.J'avais 18 ans ;j'étais malade ; l'angoisse ne me laissait aucun répit. Je luttais contre les puissances des ténèbres. Bataille et Blanchot m'accompagnaient jour après jour dans cette dure traversée de moi-même, ni l'un ni l'autre comme consolateurs mais, au contraire, en me convertissant au pire, c'est-à-dire en m'obligeant à dépasser la dimension pathologique de ce que je vivais.